« C’était un rêve pour moi »

Après la victoire de Julian Alaphilippe, hier lors de la 10e étape du Tour de France qui arrivait au Grand-Bornand, la presse revient sur les déclarations du coureurs français de l’équipe Quick-Step Floors.
Photo : Tim de Waele – Getty Images (via www.quickstepfloorscycling.com)
« J’ai pas de mots »
« J’ai pas les mots. Aller chercher une victoire sur le Tour de France, c’était un rêve pour moi. Et j’y arrive avec la manière en plus. Il y a plein de choses qui se mélangent dans ma tête, je pense à ma famille. Je savais que si je voulais gagner, il fallait que j’aille dans l’échappée. Ça avait du mal à sortir, j’en faisais un peu trop mais après j’ai vraiment tout donné, j’ai mis les tripes sur la table comme on dit, pour aller au bout. Je suis vraiment content. »
Texte : www.ledauphine.com
Mais qui es-tu vraiment, Julian Alaphilippe ?
Auteur d’un grand numéro lors de la 10e étape du Tour de France où il s’est imposé dans les Alpes, au Grand-Bornand, pour la première étape de montagne, Julian Alaphilippe a décroché la première victoire française de l’édition 2018 de la Grande Boucle. En septembre 2017, nous avions dressé le portrait du coureur de Quick Step avant les championnats du monde à Bergen. L’occasion de redécouvrir le portrait de ce « phénomène ».
Quel fut son parcours ?
« C’était un gamin hyperactif. » Franck, cousin de Julian Alaphilippe, et également son entraîneur depuis ses années cadets, l’avoue : « J’étais même obligé de réduire son programme d’entraînement sans lui dire car je savais qu’il avait toujours tendance à en faire un peu plus que ce que je lui demandais… » Le Montluçonnais l’admet : « Il fallait que je bouge tout le temps. » Son père est chef d’orchestre, lui joue de la batterie, mais c’est finalement « le vélo qui m’a un peu calé ».
Véloce, doué, très bon cyclo-crossman, il a cependant manqué de voir sa trajectoire s’arrêter à 18 ans à cause de problèmes au genou. Pendant plusieurs mois, il ne roule plus. Son CAP de mécanicien en poche, « il doute, va voir plusieurs intervenants médicaux qui ne lui disent jamais la même chose », rappelle son cousin. L’Armée de Terre le relance.
En 2013, après deux titres de champion de France espoirs de cyclo-cross, pas une équipe française ne s’intéresse à lui. Sans se poser de question, il choisit l’équipe réserve de la formation Quick Step. Le grand public le découvre un an plus tard. « Si on m’avait dit à 18 ans que je serais là aujourd’hui… »
Quel est son caractère ?
« Julian, c’est un clown », confie Julien Gonnet, un bon pote connu à l’Armée de Terre. « C’est un phénomène. Je le revois avec son treillis et son béret à l’envers… » « Julian, c’est l’optimisme même, lâche Patrick Lefévère, manager de la Quick Step. Il a la joie gravée au fond de lui. »
« Disons que j’extériorise un peu, j’aime rigoler, je décompresse… », confesse l’intéressé. « C’est sa façon à lui d’évacuer le stress », pense son cousin. « Je crois que si on lui serrait la ceinture, ça ne marcherait pas », avance Benoît Sinner, ancien de l’Armée de Terre. Dans la vie, il paraît que Julian le trublion ne peut rester seul. « Il a ce besoin d’être avec ceux qu’il aime », pense Sinner. Et d’y insuffler du rythme, toujours. Son credo, en bon mélomane.
Comment est-il sur un vélo ?
Un bourreau de travail. « J’ai la rage » dit-il. Rien à voir, donc, avec son côté farceur de la vie de tous les jours. « Pour lui, à l’entraînement, cinq heures de vélo, ce n’est pas deux… Il pleut, ce n’est pas grave ! », confie Gonnet. « Il a des capacités à aller très très loin dans l’effort », confirme Sinner.
« J’aime me faire mal », ose l’intéressé. Avec lui, tout se fait aux sensations. « Il a un capteur de puissance mais il ne veut pas l’utiliser », lâche son entraîneur, précisant qu’Alaphilippe devrait faire davantage de musculation à l’avenir. « C’est effectivement encore un peu à l’ancienne avec beaucoup d’heures de vélo », estime Patrick Lefévère.
Son style ? On le dit attaquant, puncheur. Il l’a prouvé en terminant par le passé 2e de Liège-Bastogne-Liège. « Sa grande qualité, c’est son explosivité, juge Patrick Lefévère. Pour moi, il ne pourra pas gagner un Tour, mais peut gagner beaucoup de courses ». Son poulain est en tout cas de plus en plus complet, en témoigne son succès sur le chrono de Paris-Nice, en mars.
Blessé au genou juste après, il a raté le Tour 2017, loupé quatre mois de courses. Un coup dur, vous pensiez ? Il en a vu d’autres. « Il a un vrai mental », confie son coach. Sa victoire d’étape sur la Vuelta l’été dernier l’a d’ailleurs démontré.
Texte : www.ouest-france.fr
Julian Alaphilippe, la victoire en famille
« Je suis quelqu’un qui est très famille! »: Julian Alaphilippe a immédiatement dédié à ses proches son premier succès sur le Tour de France, mardi au Grand-Bornand, après l’arrivée de la 10e étape.
En larmes après avoir franchi la ligne, l’Auvergnat de l’équipe Quick-Step est tout de suite tombé dans les bras de son cousin, Franck Alaphilippe, qui est également son entraîneur.
« C’est une relation particulière. C’est pour ça que j’ai beaucoup pensé à eux dans les derniers kilomètres. Franck qui est là, je savais qu’il allait être là sur la ligne d’arrivée. J’ai toute ma petite famille chez moi, mes frangins, mon père (Jo, NDLR), ma mère (Catherine, NDLR) », a expliqué Alaphilippe.
A 26 ans, Julian est l’aîné d’une fratrie de trois garçons. Et dans la famille Alaphilippe, tout le monde baigne dans le milieu du vélo. Bryan, 22 ans était professionnel dans l’équipe de l’Armée de Terre. Et le cadet, Léo, pratique lui aussi le cyclisme.
« L’émotion tout à l’heure, ce n’était pas forcément la frustration accumulée, c’était vraiment la douleur. Je me suis vraiment fait mal pour aller la chercher cette victoire. J’ai pu savourer et j’ai beaucoup pensé à ma famille », a raconté le vainqueur de la Flèche Wallonne au printemps, sa première classique.
« Mon père a des soucis de santé et me regardait derrière la télé. Ça m’a fait craqué parce que je suis allé loin dans la douleur pour aller la chercher celle-ci », a-t-il ajouté.
« Je suis bien placé pour le savoir, mais Julian travaille beaucoup », a loué Franck.
« Des frustrations, j’en ai à la pelle »
Depuis le début de sa carrière, le coureur de Montluçon a accumulé les frustrations. A l’image de son premier Tour de France, en 2016, quand il n’avait été devancé que par le seul Peter Sagan en haut de la rampe de Cherbourg, dans la deuxième étape.
Cette année-là, il était aussi passé près d’un succès à sa portée dans l’étape du Grand Colombier menant à Culoz. Puis il avait suivi Tony Martin, son coéquipier à l’époque, dans un très long raid aussi spectaculaire que suicidaire dans l’étape menant à Berne. Avant de chuter, lui qui est pourtant l’un des meilleurs spécialistes du peloton, dans la dernière descente du parcours olympique à Rio et terminer au pied du podium (4e).
« C’est sûr que des frustrations, j’en ai eu pas mal depuis quelques saisons », a-t-il reconnu au Grand-Bornand en énumérant: « Que ce soit ma chute aux JO, le fait d’être repris à la flamme rouge aux Championnats du monde, d’être battu par Peter Sagan dès la deuxième étape de mon premier Tour, d’avoir enchaîné les places de deuxième derrière Alejandro Valverde dans les classiques. Des frustrations, j’en ai à la pelle ».
Alaphilippe préfère positiver: « Ce sont des choses qui font grandir et qui rendent plus fort dans la tête. » D’où une émotion forte en franchissant seul, les bras en croix après s’être frappé le coeur, la ligne d’arrivée en Haute-Savoie. La douzième victoire de sa carrière, la sixième cette saison.
Texte : www.lesechos.fr