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biograpHIE de Julian

Le cyclisme ou la musique ? Julian raconte qu’il n’avait jamais imaginé devenir champion du monde dans son sport. Il avait plutôt envisagé une carrière musicale sur les traces de « Jo », son père, à la fois chef d’orchestre et chanteur d’un célèbre groupe du Cher et l’Allier, au centre de la France. 

Adolescent, il joue de la batterie « à l’oreille », et l’on retrouve invariablement cet instinct l’animer lorsqu’il convoite la victoire dans les plus grandes courses. La pratique de la batterie demande une énergie folle, une parfaite motricité des membres inférieurs et supérieurs. Le batteur est toujours en mouvement. Comme l’enfant de Saint-Amand-Montrond (Cher) où Julian naît le 11 juin 1992. Il passe ses six premières années dans un petit immeuble, à cent mètres à peine d’un vélodrome, un hasard prémonitoire ! Ses parents déménagent à cinquante kilomètres de là, à Montluçon où il vit jusqu’à l’âge adulte auprès de ses deux frères cadets, Bryan et Léo. Dans la famille Alaphilippe, Franck, le grand cousin, est un très bon coureur du peloton amateur. Son père emmène Julian sur les courses que dispute Franck. Il a aussi l’heureuse idée de l’inscrire dans un club pour canaliser l’énergie débordante de son fils. Ce dernier fait ses gammes à l’Entente Cycliste Montmarault-Montluçon. Ses premiers éducateurs remarquent chez lui un véritable don d’agilité dès qu’il enfourche son vélo. Il adore exécuter des mono-roues et adopter la position « superman » qui consiste à s’allonger sur sa bicyclette en imitant le héros de cinéma. Pédaler le rend heureux. Il a toujours la « banane », comme on dit pour définir une personne radieuse. Pour lui, l’école est d’abord buissonnière. Il préfère de loin les grands espaces, la nature, que demeurer entre les quatre murs d’une salle de classe où il se sent trop à l’étroit. Entre 16 et 18 ans, sa passion pour le vélo le conduit à briguer un Certificat d’aptitude professionnelle de mécanicien cycles et motocycles. Il alterne les cours et un emploi d’apprenti dans un magasin. « Cela me plaisait, j’aimais bien parler du matériel avec les clients, échanger avec eux, raconte-t-il. Je connais la valeur du matériel. J’ai beaucoup de respect pour les mécanos qui passent deux heures dessus après la course. Je sais le travail que cela représente. » 

Le début

Vice-champion du monde Juniors de cyclo-cross

Julian est attiré par le cyclo-cross. Il aime pratiquer ces compétitions de courte durée au rythme intense, parsemées d’obstacles qu’il franchit avec dextérité, comme un acrobate, et être au coude-à-coude avec ses adversaires. Début 2010, il est vice-champion du monde de cyclo-cross, dans la catégorie juniors, à Tabor (République tchèque). Cette médaille d’argent lui promet un bel avenir, malheureusement une douleur récurrente au genou droit l’empêche de pratiquer son sport normalement pendant presque un an. Malgré cette saison noire, l’équipe de l’Armée de Terre lui fait confiance. Julian quitte sa famille et sa région pour s’installer dans une caserne, à Saint-Germain-en-Laye, en région parisienne. « J’y ai vécu de grands moments qui m’ont rendu plus mature, dans le vélo comme dans la vie », se souvient-il. Sous le maillot reprenant les couleurs « camouflage » du treillis du soldat, il est double champion de France de cyclo-cross, chez les Espoirs, en 2012 et 2013. Parallèlement, il obtient de très bons résultats sur la route, notamment une étape de la Coupe des Nations, à Saguenay, au Canada (2012). L’Armée française le libère, en 2013, afin qu’il réponde favorablement à une proposition de l’équipe Continental Etixx-iHNed, réservoir de jeunes du ProTeam Omega Pharma-Quick Step. Il remporte trois épreuves internationales et, en fin de saison, une étape de montagne du Tour de l’Avenir s’achèvant sur le Plateau des Glières. Entre temps, en juin, Julian dispute le championnat de France, à Lannilis (Finistère). « C’était au fond de la Bretagne. J’avais couru un dimanche et Johan Molly, l’un de assistants de l’équipe, m’avait conduit aussitôt en Belgique car Patrick Lefevere voulait me voir dès le lendemain. Il ne m’avait pas dit pour quelle raison. Il m’a fait signer un contrat de deux ans. J’étais si heureux ».

En 2014, il intègre la plus grande équipe du monde, y côtoie de grands champions. Comme Tom Boonen qui, au crépuscule de son immense carrière, fait la connaissance « d’un bon garçon, respectueux, curieux. » 

2015 - 2017

son talent se révèle dans les classiques wallonnes

À 21 ans, il participe à sa première classique, l’Amstel Gold Race, où il travaille pour le futur champion du monde, Michal Kwiatkowski et obtient sa première victoire chez les professionnels sur la dernière étape du Tour de l’Ain, à Arbent. 

En 2015, ses performances de haut niveau en font la grande révélation des classiques de côtes : deuxième de la Flèche wallonne et de Liège-Bastogne-Liège, à chaque fois devancé par Alejandro Valverde. En mai, il devance les grimpeurs lors de l’étape-reine du Tour de Californie. Ce succès au sommet du Mont Baldy prouve l’étendue de son potentiel. Non seulement, il est rapide au sprint et dans des montées courtes grâce à ses qualités de puncheur. Mais, en plus, il est capable de grimper, ce qui lui ouvre de très belles perspectives. D’ailleurs, son partenaire dans l’équipe, le célèbre sprinteur Mark Cavendish prédit à Julian qu’ « il ira loin dans la vie ».

La saison 2016 confirme qu’il est taillé d’abord pour briller dans les classiques au terrain vallonné : il termine une seconde fois à la 2e place en haut du terrible Mur de Huy, à la Flèche wallonne, à nouveau derrière le champion espagnol Alejandro Valverde. 

À son palmarès, il accroche sa première épreuve à étapes, le Tour de Californie, et confirme ses aptitudes en montagne au Critérium du Dauphiné (6e). L’été venu, alors qu’il vient de fêter son vingt-quatrième anniversaire, Julian découvre le Tour de France avec l’objectif d’emmagasiner de l’expérience et la mission d’aider le sprinteur Marcel Kittel dans les étapes plates. Dès la 2e étape, à Cherbourg, il entrevoit même la victoire et le maillot jaune mais, in-extremis, Peter Sagan brise son rêve. 

Julian répète souvent qu’il a maintes fois perdu des courses avant de réussir à en gagner. Aussi, aux Jeux de Rio, chute-t-il dans le dernier passage de la descente de la Vista Chinesa, incident qui le prive d’une médaille olympique (4e)…

Il commence l’année 2017 en frappant fort à Paris-Nice où il enlève le premier contre-la-montre de sa carrière, au Mont Brouilly, et termine au 5e rang du classement. Pour sa découverte de Milan-San Remo, il prend date en finissant 3e derrière Kwiatkowski et Sagan. Malheureusement pour lui, une chute au Tour du Pays basque endommage l’un de ses genoux. L’opération est indispensable. Il doit observer une période de convalescence pendant laquelle il manque les classiques et le Tour de France. Il réapparaît en fin de saison pour s’adjuger une étape du Tour d’Espagne. Promu leader de l’équipe de France au championnat du monde, à Bergen, en Norvège, il est rattrapé sous la flamme rouge. L’année s’achève par sa 2e place au Tour de Lombardie. 

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2018

l’année des premières grandes victoires

Avec ses nombreux accessits, Julian s’est hissé dans la hiérarchie des meilleurs coureurs du monde, cependant il lui manque une grande victoire pour entrer dans le Gotha. Il l’obtient en 2018 à la Flèche wallonne où il prend une revanche éclatante sur Valverde. « C’est un soulagement, un déclic. Cette victoire change beaucoup de choses, dans la tête surtout », déclare-t-il. 

Il brille de mille feux pour ses retrouvailles avec le Tour de France. Le 17 juillet, au Grand-Bornand (10e étape), dans les Alpes, il connait le bonheur d’un premier succès dans la « grande boucle ». Et une émotion indescriptible dans les bras de Franck et pensant à sa famille. « Je me suis fait mal pour gagner. Dans les derniers kilomètres, j’ai beaucoup pensé à mes petits frères, ma mère, mon père. »

Il récidive à Bagnères-de-Luchon (16e étape), dans les Pyrénées, et défile sur les Champs-Elysées en étant vêtu du maillot blanc à pois rouges du lauréat du classement de la montagne. Dans la foulée, il s’adjuge la Clasica San Sebastian. Quel magnifique été ! Mais comme la saison a été longue, difficile et dense, l’énergie lui manque au championnat du monde à Innsbruck (8e). C’est seulement partie remise…

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2019

Milan-San Remo et un extraordinaire Tour de France !

Julian est toujours plus ambitieux. Son adrénaline, c’est lever les bras. Son printemps 2019 est celui des grandes conquêtes. D’abord les Strade Bianche, l’une des épreuves les plus exigeantes du calendrier qui se déroule sur les chemins de terre de Toscane ; et, deux semaines plus tard, Milan-San Remo, son premier « monument » des classiques. Son triomphe dans la Classicissima est total : il attaque dans le Poggio et s’impose au sprint sur la via Roma. Une deuxième Flèche wallonne donne un peu plus d’épaisseur encore à son très beau palmarès.

Surtout Julian illumine le Tour de France de ses attaques, ses coups d’audace, sa formidable résistance durant trois semaines complètement folles… À Épernay, il offre un récital de « vélo Champagne » et s’empare de son premier maillot jaune. Il s’en sépare, provisoirement, à la Planche de Belles Filles, car il le reprend à Saint-Étienne, avant de dominer le contre-la-montre à Pau au prix d’un final époustouflant ! Deux jours avant l’arrivée du Tour, lors d’une étape alpine tronquée par des glissements de terrain, il doit renoncer à son maillot jaune en haut du col d’Iseran. Il est cinquième à Paris et premier à l’applaudimètre… Julian entre définitivement dans le cœur du public qui admire ce fantastique lutteur toujours proche de lui. Et qui continue à faire l’unanimité au sein de son équipe Deceuninck-Quick Step. « Il sourit en permanence, respire la joie de vivre, met de l’ambiance dans le groupe », apprécie le directeur sportif Brian Holm. 

Il est numéro 1 mondial durant la majeure partie de la saison 2019, avant d’être détrôné par Primoz Roglic. Récompenses et honneurs s’accumulent : Vélo d’Or (une première pour un Français depuis Laurent Jalabert en 1995), Champion des champions français de L’Équipe, Trophée Flandrien international attribué pour la première fois à un coureur français par Het Nieuwsblad. Et cet hommage d’Eddy Merckx, le plus grand champion de l’histoire du cyclisme, valant tous les prix : « Il y a du Merckx chez Alaphilippe ».

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2020

Champion du monde !

La saison 2020 est bouleversée par la pandémie mondiale de la covid 19. Julian aborde sa seconde partie avec une motivation extrême. Il échoue de peu (2e derrière Wout Van Aert) dans sa tentative de conquérir un deuxième Milan-San Remo. Mais pas dans sa quête d’un nouveau maillot jaune qu’il mène à bien sur la Promenade des Anglais, à Nice. Et s’il doit s’en séparer quelques jours plus tard (pour s’être saisi d’un bidon en dehors de la zone de ravitaillement), c’est finalement pour mieux préparer le championnat du monde d’Imola, en Italie. 

Le 27 septembre, Julian signe un chef-d’œuvre : une attaque dans la côte de Gallisterna lui permet de distancer ses rivaux. Il se bat contre eux et à la fois contre la douleur pour conserver son avance jusque sur l’autodrome Enzo et Dino Ferrari où il triomphe ! Il est le premier coureur français à revêtir le maillot arc-en-ciel depuis Laurent Brochard en 1997. « J’ai réalisé le rêve ultime », savoure-t-il. 

Trois semaines plus tard, il défie les spécialistes des lieux sur les monts et chaussées en pavés du Tour des Flandres en attaquant dans le Koppenberg. Malheureusement, une chute violente lui vaut deux fractures et un tendon rompu à la main droite. 

Quelques jours avant cet accident, Julian a obtenu sa première victoire sous le maillot arc-en-ciel lors de la Flèche brabançonne. 

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2021

ARC-EN-CIEL

Il commence la saison 2021 par des résultats très encourageants : 2e du Tour de la Provence et des Strade Bianche, 1er d’une étape de Tirreno-Adriatico. En avril, il signe le triplé à la Flèche wallonne après ses succès en haut du Mur de Huy en 2018 et 2019. Il manque de peu le doublé dans les classiques wallonnes en se classant à la 2e place de Liège-Bastogne-Liège. 

Julian frappe fort dès le départ du Tour de France, en Bretagne. Le chef du « Wolfpack » attaque dans la côte de la Fosse-aux-Loups, et s’impose à Landerneau. En passant le premier sur la ligne d’arrivée, il imite le bébé suçant son pouce pour célébrer la récente naissance de son fils Nino. C’est sa sixième victoire d’étape en cinq participations à la « grande boucle ». Il porte également le maillot jaune pour la 18e fois depuis 2019. 

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2021

DOUBLE CHAMPION

Le 26 septembre, Julian remet son titre en jeu à Louvain, dans les Flandres, en Belgique, la région et le pays du cyclisme. Sur un parcours atypique comportant un circuit flandrien et un circuit urbain, il est soutenu par une équipe de France efficace et solitaire. 

Fidèle à sa conception de la course, il attaque à quatre reprises, dont la dernière fois à 17 kilomètres de l’arrivée, et s’en va conquérir en solitaire son deuxième titre, devant une foule immense. 

Il entre dans la légende du cyclisme français puisqu’aucun coureur de l’hexagone n’avait, jusqu’à présent, réussi l’exploit d’être double champion du monde depuis un siècle ! Pour la troisième année consécutive, il est récompensé par le Vélo d'Or de Vélo Magazine et est désigné Champion des champions français par le journal L'Équipe et pour la deuxième fois, il est désigné "sportif étranger préféré des Belges" par les lecteurs de la Dernière Heure.

2022

En avril, le champion du monde fait triompher son deuxième maillot arc-en-ciel à l’arrivée de la 2e étape du Tour du Pays basque.  

Depuis le commencement de sa carrière, Julian compte un total de 38 victoires, dont 2 titres de champion du monde et 23 succès dans le World Tour.  


(c) Photo News

2023

Julian est décidé à tourner la page d’une période où la malchance l’a frappé. Malheureusement, elle rôde à nouveau. Au Tour des Flandres, il est entrainé au sol à la suite d’une chute collective. Blessé à un genou, il manque une partie de la campagne des classiques. Avec un mental d’acier, il travaille dur en Sierra Nevada, lors du traditionnel stage en altitude en mai, et est enfin récompensé de ses efforts. Il remporte une étape du Critérium du Dauphiné, au sprint. Il est prêt pour le Tour de France !